Magnan et
Fillassier.Medicine and Eugenics.363
qu’il a été arrêté. L’acte accompagné de spasme génital était suivi d’un
immense soulagement qui mettait fin à l'angoisse.(i) Cet autre, chez
lequel(2) l’éréthisme sexuel n’avait plus de limite à la vue d’un mouchoir
de femme; il avait été quatre fois condamné pour vols de ces objets; il ne
dérobait jamais que le mouchoir, laissant avec grand soin tout autre objet
dans la poche fouillée.
Un autre malheureux, obsédé par le nombre 3, en était arrivé à se faire
arracher 3 dents, quand il n’en avait que deux de gâtées. Toutes ses
actions étaient combinées par 3 ; à table il demandait trois petits pains, 3
gigots, 3 verres de vin, 3 fromages, etc. Il se procure 3 cravates, 3
calepins, 3 crayons, il écrit 3 lettres de 3 pages et sur l’une d’elles adressée
à sa soeur, il l’embrasse, elle, sa bonne et son chien, pour que cela fasse 3.
Parfois il était pris du besoin irrésistible de japper ; s’il essayait de
résister, il éprouvait un serrement en cercle à la base de la poitrine, et un
point douloureux à la région épigastrique, il se sentait en outre, angoissé,
avec un agacement très pénible aux mains et aux pieds, analogue, dit-il, aux
décharges électriques. Dès qu’il avait pu aboyer imitant les jappements
d’un chien qui l’avait autrefois mordu, il se calmait et se sentait soulagé.
Pour pouvoir donner satisfaction à ce besoin impérieux de japper et
parfois aussi de rire et de pleurer sansi motifs, il avait loué une chambre
d’hôtel au fond d’un corridor, et là il se soulageait, dit-il, se déchargeait
en aboyant parfois pendant plus d’une heure. Quoique occupant une
chambre isolée, il jappait si fort que les locataires se plaignaient et qu’ils
l’ont battu une fois, sans qu’il ait pu, malgré ses efforts, s’arrêter
d’aboyer. Il avait en outre, par moments, des impulsions à déchirer, à
briser, à voler, à prononcer des mots injurieux; il avait encore la folie du
doute, la crainte du toucher et quelques autres phobies.
Ce déséquilibré, malgré ce nombre si varié de syndromes, à cause même
de cette multiplicité et de cette variété, était curable et a guéri en quelques
mois à l’asile, tandis qu’il avait, au dehors, traîné pendant plusieurs années
une existence des plus misérables.
Parmi ces dégénérés, nous avons encore plusieurs persécutés-persécuteurs
fort dangereux et notamment la malade qui avait tiré sur le Docteur Gilles
de la Tourette pour se venger des tortures que lui avaient fait subir les
médecins et une autre femme qui, se disant hypnotisée à distance par Sarah
Bernhardt, lui avait fait des menaces de mort. La mère de cette dernière-
malade, également aliénée, très remuante, protestant, au dehors, contre la
séquestration de sa fille, était parvenue à gagner à sa cause deux députés qui,
mal informés assurément, avaient commencé des démarches pour faire cesser
cette prétendue séquestration arbitraire.
(1) Magnan—Rapport sur le Service Central de l’Admission, 1895.
(2) Magnan—Rapport sur le Service Central de l’Admission, 1894.